les tueurs du brabant sont :

concernant ce qui - de mon point de vue - est la question essentielle, celle du commanditaire: il y a une piste rationnelle qui relève de ce qu'on pourrait appeler pompeusement la sociologie historique.

dans cette piste, il y a quelque chose dont tout le monde se rend compte depuis longtemps, peut-être en particulier depuis les années 80, il faudrait vérifier la concommitance. Ce quelque chose concerne l'économie politique en Belgique et dans l'Union européenne, et il a plus que jamais une réalité tout à fait concrète qui est le méga-clash imminent entre la gauche et la droite, le conflit terrible qui fera vaciller l'Union européenne dès l'instant où le dossier de l'Europe sociale sera vraiment à l'ordre du jour, je veux parler de la fameuse question de la représentation syndicale dans les petites et moyennes entreprises; les socialistes espèrent se rallier le soutien des petits entrepreneurs qui votent traditionnellement à droite parce qu'aussi petits soient-ils, ils sont animés du même esprit entrepreneurial que les fondateurs de multinationale, mais ils ont à mon avis peu de chances de gagner à leur cause ces petits indépendants qui continueront de voter à droite en faveur du camp libéral, en particulier parce qu'un créateur de PME craint comme la peste l'intrusion des syndicats dans son entreprise qu'il considère comme son bébé, le fruit de ses oeuvres parce qu'il pressent qu'une grève, ça passera, que deux grèves ça passera peut-être encore mais qu'à la troisième grève, SON entreprise sera par terre.

Ce méga-clash, qui fera vaciller bientôt l'Union européenne, a peut-être une traduction qui a un sens - un vrai sens, un sens profond - dans la genèse des tueries du Brabant. Pourquoi ? Parce que les petits indépendants sont étranglés - que ce soit dans la Brabant wallon ou ailleurs - par les grandes surfaces qu'ils considèrent comme des entités collectivistes oppressantes et oppresseuses. Par surcroît, ils sont, d'une part, étranglés mais ils entendent de plus en plus de responsables politiques leur dirent: vous avez raison, vous êtes les vrais créateurs de richesse dans notre pays où il n'y a pas assez de pme, en particulier en wallonie, alors qu'en Flandre, elles grouillent et pullulent, ce qui fait la grande force de la Flandre. Ce DOUBLE LANGAGE des pouvoirs publics à l'égard des petits indépendants les rend fous de frustration, d'exaspération, ce qui a motivé dans le passé en France leur vote pour Pierre Poujade, qui a tout de suite été considéré comme un homme d'extrême droite alors qu'il ne faisait finalement que défendre la cause des petits indépendants. Cette frustration et cette exaspération dues au double langage de l'Etat à leur égard sont peut-être la clé des tueries du Brabant parce qu'elles constituent un cocktail explosif qui devait un jour ou l'autre provoqué une déflagration. Avec les tueries du Brabant wallon, on est peut-être simplement passé du sens propre au sens littéral du mot "déflagration", le détonateur étant le fait qu'à un moment donné, les petits indépendants ont subi la concurrence des grandes surfaces, les années 80 constituant peut-être le point culminant de cette concurrence très âpre, de sorte que les petits indépendants ont eu tout à coup réellement le pistolet sur la tempe. Conséquence funeste:

Les petits indépendants détestent les grands magasins.

Les petits épiciers détestent les grands magasins d'alimentation.

Ce que disent les petits épiciers: "ces grands magasins veulent notre mort".
Ce que disent les petits épiciers en réaction: "si ces grands magasins veulent notre mort, eh bien, nous allons riposter, nous allons tuer ces grands magasins".

Mon point de vue général: il faut chercher le commanditaire (la question de savoir qui sont les exécutants est fort peu intéressante, les exécutants sont de pauvres gens du quart-monde qui se prostituent, font du petit trafic de drogue, exécutent des contrats en tant que tueurs à gage - le Brésil est à cet égard un excellent laboratoire criminologique)
Mon point de vue particulier: le commanditaire, c'est un groupe de petits indépendants du Brabant wallon qui ont décidé de ne pas mourir, de ne pas se laisser abattre, de ne pas se laisser flinguer et qui ont décidé de riposter et de flinguer les grandes surfaces.
post-scriptum: dans cette hypothèse, les exécutants et les commanditaires sont peut-être les mêmes personnes, des petits indépendants qui ont tiré dans le tas dans ces pourritures de grands magasins "qui plombent notre chiffre d'affaires et à qui on va plomber la cervelle", et pour les clients considérés comme des traîtres qui "nous ont laissé tomber et crever": une balle dans la tête.

parfait cette hypothèse

" des petits indépendants qui ont tiré dans le tas dans ces pourritures de grands magasins "qui plombent notre chiffre d'affaires et à qui on va plomber la cervelle", et pour les clients considérés comme des traîtres qui "nous ont laissé tomber et crever": une balle dans la tête. "

J'aime beaucoup cette théorie et la manière dont vous la présentez. c'est un mobile parfaitement crédible pour le seconde vague.

Mais alors pourquoi les tbw ne s'en sont pris presque qu'exclusivement à Delhaize ?

Piste intéressante (parmi d'autres) sur le plan de la réflexion. Il est vrai que les crimes incompréhensibles comme les TBW contribuent souvent à élaborer toutes sortes de thèses qui n'ont pas encore été évoquées pour tenter de trouver une explication.

En effet, aucun élément matériel ou indice dans les faits ne mène de près ou de loin à cette piste, au-delà de la cohérence de votre réflexion.
Certes, Delhaize était l'unique enseigne touchée pendant la seconde vague et seule celle-ci pourrait correspondre à votre raisonnement. Il est vrai que Delhaize et Colruyt ont été la cible de braquages pendant la première vague mais tous n'ont pas été sanglants et le butin était conséquent, cela ressemble à du banditisme classique (bien que plus violent que la normale) ou à des règlements de compte mais en tout cas un mobile différent de 85. Votre piste n'explique pas les autres crimes de la première vague (assassinats, auberge, bijouterie, affrontements quasi recherchés avec les forces de l'ordre, ...).

S'il y a une piste à suivre en lien avec les enseignes de grande distribution, cela concernerait celle du racket sur la firme Delhaize en se limitant à la seconde vague (au vu du mode opératoire et c'était la seule touchée), les "attaques" de la première vague sur les magasins Delhaize ET Colruyt correspondant suffisamment à des faits de braquages, de plus les autres faits de 82-83 n'ont rien à voir.
Mais même là, il n'y a pas eu d'élément probant en direction de cette piste. On pourrait éventuellement envisager que Delhaize aurait fini par céder en payant la somme exigée après Alost (ce qui correspond aussi à la mort possible d'un des tueurs et un niveau de terreur jamais atteint sur le plan du dispositif de sécurité mis en œuvre dans le pays - donc pas forcément l'élement le plus probant pour expliquer la fin des TBW).
De plus, même dans ce cas de figure, l'on sait bien que les TBW sont des faits criminels uniques dans l'histoire. Nulle part dans le monde, des événements similaires se sont produits. Or, le racket (y compris à l'encontre d'enseignes de grande distribution) ne date pas de 1985 et continue partout aujourd'hui, et le mode opératoire des TBW n'a rien à voir avec ce qui se fait d'habitude. Il aurait plutôt s'agit de faire exploser des enseignes (comme l'avaient envisagé Bouhouche & Beijer d'après ses dires) ou de les incendier, ou faire pression sur du personnel.
Plus important encore, cette piste concerne le grand banditisme, et même si l'on veut croire au mythe de l'omerta qui concernait peut-être encore 1% de ce milieu (cette partie ne se livrant certainement pas à ce genre d'actes), on ne peut raisonnablement penser qu'il est possible que rien n'ai filtré en bientôt 30 ans ! D'autant plus avec la prime pour laquelle n'importe quel truand (qu'il soit petit voyou ou gangster de grand envergure) vendrait sa mère, et en plus à ce prix là il la livre.

Voilà pourquoi à mon sens ça ne tient pas la route. Il y a certainement quelques personnes en possession d'informations (qui les ont d'ailleurs peut-être transmises à la CBW), ne serait-ce que parcellaires, sur la première vague, ceux qui se taisent ayant peur de par le lien qu'on fait avec 1985 et ses auteurs.
Quoi qu'il en soit, les auteurs (du moins exécutants) doivent être des gens extrêmement isolés - soit grands professionnels (peu de chances) qui n'avaient pas de liens avec la région ; soit des dégénérés "prédateurs" repliés du coin - pour que rien n'ait filtré. Si on rajoute le mode opératoire de 1985, cet aspect de l'affaire laisse selon moi la place aux pistes extrême-droite (ce qui n'exclut pas le caractère "prédateurs") & implication de membres de forces de l'ordre. En fonction des suspects envisagés, on peut faire un lien ou non avec les milieux militaires/Stay-Behind de l'époque.