Extrait du rapport page 68
En formulant cette dernière présomption, les magistrats ont appliqué dans un certain sens la « théorie » figurant dans une note (non datée et anonyme) relative à la « diplomatie secrète » des services secrets, note qui figure en annexe du rapport. Dans cette note plus que curieuse,
on peut lire (190) :
« Les événements criminels dont la commission de la Chambre des représentants s’est occupée semblent révéler :
1° qu’en Belgique, comme ailleurs, certains militants de groupes privés et, peut-être même, d’institutions officielles, sont capables de commettre n’importe quel acte criminel par conviction, lorsqu’ils se sentent soutenus par une « autorité amie »;
2° que ces actes — ou du moins plusieurs d’entre eux — peuvent être interprétés comme des protestations contre le laxisme de la Belgique en matière de sécurité :
— (...)
— la presse réputée subversive (l’incendie de « Pour »);
— l’insuffisance des moyens pour lutter contre le trafic
de drogue (affaire François, BND-AIC);
— l’incapacité pour notre dispositif policier de s’emparer d’auteurs de crimes surpris en flagrant délit (affaire Dekaise et celle du Colruyt de Nivelles);
— le manque de sécurité à l’intérieur même des installations militaires (vol de documents OTAN, vol à la caserne de l’ESI).
(…)
Enfin, on a souligné que les tueries de Braine-l’Alleud et d’Overijse avaient eu lieu seize jours avant les élections législatives du 13 octobre 1985, lesquelles ont été suivies par la tuerie d’Alost du 9 novembre.
10. Il est établi dans un cas (Florennes) et il est probable dans d’autres que certains de ces faits ont été inspirés directement par des personnes ayant des relations avec des services secrets amis. Surtout, il n’est pas exclu que certains militants se soient inspirés des méthodes de la diplomatie clandestine pour concevoir et réaliser des opérations qu’ils
croyaient être de nature à rencontrer les voeux d’« autorités amies ». ».
Il n’y est toutefois pas précisé de quelles autorités il s’agit (pourrait s’agir). Les magistrats ne se prononcent pas, eux non plus, à ce sujet. La commission d’enquête ne se prononce pas davantage, mais sa façon de faire n’est en tout cas ni positive ni explicite. Il est toutefois singulier
qu’elle signale également, lorsqu’elle examine la possibilité que les Etats-Unis se soient peut-être livrés à une certaine diplomatie clandestine sur le territoire belge, notamment antpar la création et le maintien d’un propre réseau autonome de nature stay behind (191) :
« 2° Aux environs de 1981, Paul Latinus a affirmé à plusieurs reprises travailler pour des services américains;
son compère Marcel Barbier a prétendu également travailler pour une organisation internationale dont il a toujours tu le nom; il était par ailleurs détenteur d’un pistolet Colt 45.
Par ailleurs, Paul Latinus a déclaré en 1983 « que son organisation, le WNP, à laquelle appartenaient Libert, Barbier et d’autres, travaillait pour une puissance étrangère alliée et contre l’infiltration soviétique en Belgique. » (Le Soir, octobre 1983).
3° Le Colt 45 n’a jamais figuré dans la panoplie des armes mises à la disposition des agents recrutés pour le « stay behind » belge. ».
Répondant à la question de savoir si des relations ont pu exister entre les activités du réseau stay behind et les actes de terrorisme et de grand banditisme perpétrés en Belgique pendant les dix dernières années, la commission souligne (192) :
« [qu’elle] ne dispose d’aucune indication permettant de conclure qu’il y a eu le moindre lien entre le réseau et les actes de terrorisme et de grand banditisme. Le refus des responsables de SDRA VIII et de STC/Mob. de communiquer aux magistrats experts l’identité des agents civils n’a
pas permis de faire les vérifications qui eussent pu — probablement — éliminer tout doute. ».
Fin de l'extrait.
Voilà de nouveau un lien, non pas basée sur des éléments matériels d'un acte, mais sur une politique générale qui amène vers des décisions d'actes.