Le dernier sprint derrière les tueurs du brabant
MARC METDEPENNINGEN
mardi 06 mars 2012, 05:54
L’émoi considérable suscité par les « Tueries du Brabant » et ses 28 morts a érigé l’enquête menée depuis plus de 27 ans en cause nationale. La ministre de la Justice, le procureur du Roi de Charleroi, le procureur général de Mons, la juge d’instruction Martine Michel et la nouvelle équipe d’enquêteurs l’ont répété lundi devant les familles des victimes et les survivants des massacres : ils iront jusqu’au bout. Et c’est tout à leur honneur. Mais ce « bout » à atteindre apparaît de plus en plus illusoire. Le temps a effacé des mémoires. Il a solidifié des hypothèses à défaut de disposer de débuts de certitudes. De nouveaux enquêteurs, une juge boostée par l’importance de l’enjeu, de nouvelles techniques scientifiques et d’enquête : le jeu ne repart pourtant pas de zéro, tant il est compliqué. Il est demeuré « incrackable ». Il est peut-être voué à demeurer un éternel mystère criminel, comme tant d’autres affaires moins médiatisées. L’identification nouvelle d’une « trace d’ADN masculin » redonne de l’espoir aux familles des victimes : comme tant d’autres annonces des années passées.
En novembre 2015, soit dans 1.342 jours, les Tueries seront prescrites. Ces trois ans et huit mois seront insuffisants pour identifier les auteurs de chacune des attaques, les traduire devant une cour d’assises, emporter leur condamnation définitive. Cette mission est impossible. La ministre de la Justice s’est engagée à chercher des solutions pour allonger les délais de prescription, déjà portés à 30 ans. Des voix se sont élevées pour rendre cette série de crimes imprescriptibles, les hissant à hauteur des crimes contre l’humanité, ce qui serait porter ces sordides attaques au niveau des génocides ; ce qu’elles ne sont pas.
Les « Tueries du Brabant » demeurent une cause nationale. Elles seront résolues « au sprint » par l’enquête judiciaire relancée, ou plus tard, par le hasard ou l’histoire judiciaire. Il faut espérer que le dynamisme de la juge Michel aboutira en temps utile. Il serait par contre inquiétant de chipoter avec les règles de prescription pour donner une nouvelle chance à une enquête qui tourne en rond depuis tant d’années. Ce serait injuste pour toutes les autres victimes d’autres faits criminels, tout aussi insupportables…
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"Ne rien nier à priori, ne rien affirmer sans preuve."
( Dr. Robert RENDU)